REF 295 - Etude de Christophe Canivet (2019) sur l'existence de Constant Défortescu



À la charnière des XIXe et XXe siècles, Constant de FORTESCU (1868-1907) se présente comme le spécialiste de la seconde main et du recyclage à Bayeux, non pas en tant que simple chiffonnier mais en tant que grossiste.

À en croire ses nombreuses annonces et offres d'emploi, il collecte et revend les grands classiques de la profession : cuirs et chiffons
(1), porcelaine et faïences (2), verrerie et poterie, vieux métaux et ferraille (3), crins et baleines (4), mais aussi, plus spécifiques à la vie agricole du Bessin, gui de pommier (5), peaux de lapins (6), cires d'abeilles, « peaux de sauvagines » (7), « charrée de lessive » (8), fumier et bouteilles à cidre (9) etc... Activité probablement moins courante, il fait aussi le commerce en gros d'escargots (10). La maison se chargeant du transport de toutes ces marchandises, elle employait plusieurs charretiers et chevaux.

Pour ce faire, Constant de FORTESCU avait son domicile
(11) et son magasin au 18 rue de Nesmond (12), près du Séminaire (13), mais aussi un grand entrepôt (les « Grands Entrepôts du Bessin » (14)) boulevard Sadi-Carnot, à l'emplacement de l'ancienne scierie RAISIN, entrepôt qui sera repris après sa mort par son concurrent (15), Victor JAUME (16), après la mise en vente du fonds de commerce (17). À noter qu'un autre de FORTESCU a la même activité à la mine de Littry, sous l'appellation « Maison LEVAVASSEUR-DE FORTESCU » (18) . Il s'agit plutôt de Louis Jean, né à Trévières en 1866. (19)

Si Constant de FORTESCU a défrayé les chroniques judiciaires, c'est toujours (ou presque
(20)) en tant que victime. On remarquera notamment que deux de ses employés ont abusé de sa confiance en s'échappant avec les sommes d'argent (21) qu'il leur avait confiées, le premier devant aller faire un dépôt à la banque (22), le second devant aller chercher de la ferraille chez une cliente et la payer en retour (23). Plus fréquemment, il est victime de vols de marchandises (24)… ou de bêtes à cornes (25).

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(1) - Le Bonhomme normand, n° du 05 août 1904
(2) - Le Bonhomme normand, n° du 30 avril 1897
(3) -
Le Bonhomme normand, n° du 04 septembre 1893
(4) -
Le Bonhomme normand, numéro du 15 décembre 1899
(5) - Le Bonhomme normand, n° du 13 septembre 1901
(6) - Pour la colle ou pour la fourrure ?
(7) - Ce sont les peaux d'animaux sauvages, notamment les carnassiers tels que renards, fouines, blaireaux etc
(8) -
Le Bonhomme normand, n° du 02 décembre 1904.

À l'époque, la cendre obtenue par carbonisation des végétaux servait tout autant à la lessive qu'à l'amendement des sols ou à la fabrication du verre. Si habituellement, il s'agit de cendre de bois, dans le Bessin, la « charrée » semble plus particulièrement désigner la cendre de varech. J'avais déjà repéré ce terme dans L' Indicateur de Bayeux n° du 22 juin 1888. Concernant l'exploitation des varechs, voir, même si l'article concerne plus spécifiquement les côtes du Cotentin, Le Journal de Cherbourg et du département de la Manche du 22 avril 1838.

(9) - L' Indicateur de Bayeux, n° du 07 février 1905
(10) - Notamment
Le Bonhomme normand, n° du 02 mars 1900, Le Bonhomme normand, n° du 02 novembre 1900 & Le Bonhomme normand, n° du 13 septembre 1901
(11) - Voir les recensements et son acte de décès.
(12) -
L' Indicateur de Bayeux, n° du 03 février 1899
(13) -
L'Indicateur de Bayeux , n° du 24 décembre 1900
(14) -
Le Bonhomme normand, numéro du 02 décembre 1904
(15) -
L' Indicateur de Bayeux, n° du 07 février 1905
(16) -
L' Indicateur de Bayeux, n° du 28 avril 1911
(17) -
Le Bonhomme normand, numéro du 08 octobre 1909
(18) -
Le Bonhomme normand, numéro du 21 juillet 1911
(19) - Selon
le recensement de 1906. Mais ne serait-il pas plutôt né à Villiers-Fossard ?
(20) -
Le Bonhomme normand, numéro du 05 janvier 1894
(21) - Pour mieux apprécier la valeur des sommes détournées, il faut se rappeler qu'en 1900, le kilo de pain blanc vaut 30 centimes de franc (voir
Annuaire statistique 1900 p. 171).
(22) -
Le Bonhomme normand, n° du 14 mai 1897
(23) - L' Indicateur de Bayeux, n° du 20 juillet 1906
(24) -
Le Bonhomme normand, n° du 30 novembre 1900 & L' Indicateur de Bayeux, n° du 24 janvier 1902
(25) -
Le Bonhomme normand, n° du 05 avril 1901




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